Présentation d'artiste (entretien avec Patrick Le Fur, critique d'art )
Roger Vuillemot
L'émotion au cœur d'un artiste mariant argile et bronze.
Après avoir découvert les oeuvres et discuté quelque peu avec l'artiste j'ai été étonné d'apercevoir (et d'entendre) dans son nom même les « lettres » de noblesse de sa création, les « termes » de son propos. En effet, on peut le constater, pour Roger il est nécessaire d'oser, pour Vuillemot il est question de Vie, de Mot. Et, implicitement, par voie de conséquence d'Emotion.
Et, parmi les plus fortes émotions qu'ai connu ce lyonnais, il faut bien évoquer celle provoquée par une matière et sa transformation par la main humaine. Dès son enfance R. Vuillemot est attiré par le métal et ses avatars : son père étant professeur de métallerie, avec ses élèves, il participe à l'occasion à des séances d'atelier de forge. Plus douce, plus légère, sera l'influence de sa mère : loin de la pince, c'est le pinceau, la palette qu'elle manie lors de ses loisirs. L'autre émotion, si l'on ose utiliser ce mot en la circonstance, est liée aux aléas de la vie et du destin (...). Et contre toute attente, attiré par sa tendresse et ses transformations, c'est vers l'argile qu'il se tourne. Comme Adam qui fut formé de cette matière, l'artiste Vuillemot naquit sur « terre », presque par hasard.
Solitaire, sensible, comme l'est l'artiste par définition, Roger Vuillemot choisi de communiquer avec l'Homme et la Nature de manière simple, symbolique, émouvante mais aussi avec le recul nécessaire qu'induit l'humour, avec un rien de provocation, sans méchanceté aucune.
Son travail s'articule autour de quatre grandes thématiques : la Main, le Coeur, la Personne, la Campagne.
Tout l'humain dans les mains offertes par Vuillemot, bien tendues et figées dans une gracieuse immortalité, s'offre au regard : la fraternité, la complicité, l'humilité mais aussi, bien sûr, le contact, le travail, la création. Des mains où le bronze se marie, parfois, au verre, sérigraphié, où les lignes, rides, plis de la peau se marient aux lignes, signes, taches laissées par l'encre d'un écolier sur un buvard. Des mains qui nous racontent des histoires, qui s'inscrivent dans nos mémoires dans leur « installation », leur positionnement sculptural sur pied et socle.
Tout le battement du monde dans les cœurs qui « tanguent » en duo la danse de la vie et de l'amour. Des coeurs qui battent au rythme du nôtre et de celui du monde ; tout en douceur, celle d'un bronze lisse et patiné.
Toute la variété du monde à travers cette galerie de personnages, de personnes qui parfois doivent aussi être vu(e)s comme autant de « Guignols » mis en scène dans la tragi-comédie de la Vie. Des « Raboing », comme les nomme Vuillemot, des types très typés en bronze patiné et ciré : amoureux, danseurs, couples enlacés ou « chagrinés », groupes tassés dans un code barres, dénotant ironiquement ainsi leur vénalité, leur avidité à consommer... Voilà aussi, pour épater la galerie, berger, bigot, prêtre ou sorcier, ou pour, ricaner de la ménagerie, lion ou huître.
Toute la beauté et la générosité de la campagne, de la terre dans ces épis de blé, altiers, fiers de leur « superbe », dans ces humbles bleuets, ces gazons de bons et beaux tons. Roger Vuillemot se met au vert en se jouant des couleurs. Avec lui le bleuet peut aussi être violet, l'herbe rouge, rose ou bleu. Et les « carrés de gazon », modulables, mettent l'art en jeu : pour le créateur comme pour le spectateur. Plantant ainsi ces végétaux de bronze, Roger Vuillemot propose une oeuvre ludique certes, tout en donnant à voir et à réfléchir. S'apercevoir que la beauté est là, toute proche, dans le jardin, le champ, la forêt ; et qu'il faut, enfin, ne pas passer à côté. Se rendre compte de la fragilité et du don offert par la nature. Dans cet écho à l'écologie la sculpture donne du volume à la prise de conscience nécessaire...
Et, reprenant à son compte, mais sans prétention aucune, Vuillemot de rappeler que Vincent (Van Gogh) écrivait à Théo (son frère) : « Je cherche à faire des études de blé... » et Théophile Gauthier, dans « L'art », extrait de ses « Emaux et camées », d'affirmer : « Statuaire, repousse l'argile que pétrit le pouce quand flotte ailleurs l'esprit. (...) »
Roger Vuillemot, patiemment et humblement, sculpte sa carrière déjà conséquente. Aujourd'hui elle prend du volume, se développe : il envisage de présenter aux collectivités locales des installations sur des ronds-points routiers, à base de « Coeurs qui tanguent » ou de « Bleuets » en bronze, monumentaux (3m), et aussi, a contrario, de réaliser des petits livrets mêlant bronze et nature.
A l'évidence tout « pousse » cet artiste à présenter, offrir beauté et simplicité au coeur des villes, au coeur de la Vie, au plus près de l'Homme.
Patrick Le Fur, mars 2007.
expositions :
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